mardi 24 novembre 2015

Sainte CÉCILE (22 novembre)

« Mon Dieu,
conservez mon cœur pur,
afin que je ne sois pas confondue
devant vous. »


(Sainte Cécile)




ODE À SAINTE CÉCILE

(poésie de Ste Thérèse de l'Enfant-Jésus)


PREMIÈRE VERSION :


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1- Ô Sainte bien-aimée, je contemple ravie
Le sillon lumineux qui demeure après toi :
Je crois entendre encor ta douce mélodie,
Oui, ton céleste chant arrive jusqu’à moi.

2- De mon âme exilée, écoute la prière :
Laisse-moi reposer sur ton cœur virginal,
Ce lys immaculé qui brilla sur la terre
D’un éclat merveilleux et presque sans égal.

3- Ô très chaste Colombe, en traversant la vie
Tu ne cherchas jamais d’autre époux que Jésus !
Ayant choisi ton âme, Il se l’était unie,
La trouvant embaumée de toutes les vertus.

4- Cependant un mortel, radieux de jeunesse,
Respira ton parfum, blanche et céleste fleur !
Afin de te cueillir, de gagner ta tendresse,
Valérien voulut te donner tout son cœur.

5- Bientôt il prépara des noces magnifiques,
Son palais retentit de chants mélodieux...
Mais ton cœur virginal redisait des cantiques
Dont l’écho tout divin s’élevait jusqu’aux Cieux !

6- Que pouvais-tu chanter, si loin de ta Patrie,
Et voyant près de toi ce fragile mortel ?
Sans doute tu voulais abandonner la vie
Et t’unir pour toujours à Jésus dans le Ciel...

7- Mais non... j’entends vibrer ta lyre séraphique,
Lyre de ton amour dont l’accent fut si doux,
Tu chantais au Seigneur ce sublime cantique :
« Conserve mon cœur pur, Jésus mon tendre Époux !... »

8- Ineffable abandon ! Divine mélodie !
Tu dévoiles l’amour par ton céleste chant.
L’amour qui ne craint pas, qui s’endort et s’oublie
Sur le Cœur de son Dieu, comme un petit enfant...

9- Dans la voûte azurée parut la blanche étoile,
Qui venait éclairer de ses timides feux
La lumineuse nuit qui nous montra sans voile
Le virginal amour des époux dans les Cieux...

10- Alors Valérien rêvait la jouissance,
Cécile, ton amour était tout son désir...
Il trouva le bonheur dans ta noble alliance :
Tu lui montras la vie qui ne doit pas finir.

11- « Jeune ami, lui dis-tu, près de moi toujours veille
Un Ange du Seigneur qui garde mon cœur pur,
Il ne me quitte pas, alors que je sommeille,
Il me couvre avec joie de ses ailes d’azur.

12- « La nuit, je vois briller son aimable visage
D’un éclat bien plus doux que les feux du matin,
Sa face me paraît la transparente image,
Le pur rayonnement du visage divin. »

13- Valérien reprit : « Montre-moi ce bel Ange,
Afin qu’à ton serment je puisse ajouter foi.
Autrement, crains déjà que mon amour se change
En terrible fureur, en haine contre toi... »

14- Ô Colombe cachée dans le creux de la pierre !
Tu ne redoutais pas les filets du chasseur :
La Face de Jésus te montrait sa lumière,
L’Évangile sacré reposait sur ton cœur...

15- Tu repris aussitôt avec un doux sourire :
« Mon céleste Gardien exauce ton désir,
Bientôt tu le verras, il daignera te dire
Que pour voler aux Cieux, tu dois être martyr.

16- « Mais avant de le voir, il faut que le baptême
Répande dans ton âme une sainte blancheur,
Il faut que le vrai Dieu l’habite par Lui-même,
Il faut que l’Esprit-Saint soit la vie de ton cœur.

17- « Le Verbe, Fils de Dieu et le Fils de Marie,
Dans son immense amour s’immole sur l’autel :
Tu dois aller t’asseoir au Banquet de la Vie
Afin de recevoir Jésus le Pain du Ciel.

18- « Alors, le Séraphin t’appellera son frère,
Et voyant dans ton cœur le trône de son Dieu,
Il te fera quitter les plages de la terre :
Tu verras le séjour de cet esprit de feu. »

19- « Je sens brûler mon cœur d’une nouvelle flamme,
S’écria dans sa joie l’ardent patricien.
Je veux que le vrai Dieu habite dans mon âme,
Cécile, mon amour sera digne du tien !... »

20- Revêtu de la robe emblème d’innocence,
Valérien put voir le bel Ange des Cieux.
Il contempla ravi sa sublime puissance,
Il vit le doux éclat de son front radieux.

21- Le brillant Séraphin tenait de fraîches roses
Mélangées de beaux lys éclatants de blancheur :
Dans les jardins du Ciel, ces fleurs étaient écloses
Sous les rayons d’amour de l’Astre créateur.

22- « Époux chéris des Cieux, les roses du martyre
Couronneront vos fronts, dit l’Ange du Seigneur.
Il n’y a pas de voix, il n’y a pas de lyre
Capables de chanter cette grande faveur !

23- « Je m’abîme en mon Dieu, je contemple ses charmes,
Mais je ne puis pour Lui m’immoler et souffrir.
Je ne puis lui donner ni mon sang ni mes larmes,
Malgré tout mon amour, je ne saurais mourir...

24- « La pureté, de l’Ange est le brillant partage :
Son immense bonheur ne doit jamais finir ;
Mais sur le Séraphin, vous avez l’avantage :
Vous pouvez être purs, et vous pouvez souffrir !...

25- « De la virginité, vous voyez le symbole
Dans ces lys embaumés que vous envoie l’Agneau :
Vous serez couronnés de la blanche auréole,
Vous chanterez toujours le cantique nouveau.

26- « Votre chaste union enfantera des âmes
Qui ne rechercheront d’autre époux que Jésus :
Vous les verrez briller comme de pures flammes,
Près du trône divin, au séjour des élus. »

27- Cécile, prête-moi ta douce mélodie :
Je voudrais convertir à Jésus tant de cœurs !
Je voudrais comme toi sacrifier ma vie,
Je voudrais lui donner et mon sang et mes pleurs...

28- Obtiens-moi de goûter sur la rive étrangère
Le parfait abandon, ce doux fruit de l’amour !
Ô ma Sainte chérie ! bientôt, loin de la terre,
Obtiens-moi de voler près de toi sans retour...


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PREMIÈRE VERSION :
sur l'air original 
"Prends mon cœur, le voilà !"



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Strophes inédites de la poésie de Ste Thérèse 

sur l'air original

"Dieu de paix et d'amour"


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1- Douce Vierge Cécile, ô ma Sainte chérie,
Que ne puis-je emprunter la voix des bienheureux
Pour te chanter l'amour dont mon âme est remplie !
Que ne puis-je bientôt te contempler aux Cieux !...

2- Beau lys immaculé, tu brillas sur la terre
D'un éclat merveilleux et presque sans égal.
Ah ! laisse-moi chanter sur la rive étrangère,
Ton suave parfum, ton éclat virginal...

3- De l'ardent Séraphin, je comprends le langage :
  [O très chaste Colombe ! je comprends ton langage :]
Cécile comme toi, je veux suivre l'Agneau !
Je n'aime que Jésus et je veux sans image,
Oui, je veux contempler en face un Dieu si beau !...

4- Ô Sainte Bien-Aimée, exauce ma prière !
Je voudrais imiter tes sublimes vertus ;
Je te confie mon âme et ma vie tout entière,
Je te confie mon cœur, guide-le vers Jésus !...




Plus sur ce Cantique, ici : 






 








CANTIQUE
"Ô Patronne des saints cantiques" :
 
https://montfortajpm.blogspot.fr/2016/11/a-sainte-Cecile-cantique-o-patronne-des-saints-cantiques.html




* * *


  L’UTILITÉ DES CANTIQUES

(cantique de St Louis-Marie Grignion de Montfort)




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1- Chantons, ma chère âme, chantons,
Faisons retentir nos cantons
D’une très sainte mélodie :
Le Ciel et tout nous y convie !

2- Notre grand Dieu toujours joyeux
Nous écoute du haut des Cieux,
Il aime beaucoup les cantiques :
Ce sont ses concerts angéliques.

3- Écoutons les anges chanter
Et chantons pour les imiter !
Ils sont anges par leurs louanges :
En chantant nous deviendrons anges.

4- Jour et nuit brûlant d’un saint feu,
Ils chantent les grandeurs de Dieu ;
Dieu même y prête les oreilles :
Chantons donc comme eux ses merveilles !

5- En chantant ils brûlent d’amour :
Chantons, brûlons à notre tour !
En chantant ils soufflent leurs flammes :
Chantons pour enflammer nos âmes !

6- Leurs airs font retentir les cieux,
Faisons un écho merveilleux :
Que tout chante et se réjouisse
Et que la terre au ciel s’unisse !

7- Chantons, mais chantons comme il faut
Pour chanter dans les Cieux plus haut :
Chantons, âme prédestinée,
Chantons pour être couronnée.

8- Mon cantique est désapprouvé
Du mondain et du réprouvé.
Tant mieux ! puisqu’il ne veut pas croire,
Sur lui je chanterai victoire.

9- Dieu veut que ses bons serviteurs
Chantent jour et nuit ses grandeurs :
Quand toute son Église chante,
Il triomphe à sa voix charmante.

10- Comme il est toujours bienheureux,
Il veut des serviteurs joyeux.
Le trouble le chasse d’une âme
Et la tristesse éteint la flamme.

11- Dieu fait chanter en tous les lieux
Le prêtre et le religieux :
Il leur fait chanter ses mystères
Les jours et les nuits même entières.

12- Il trouve un très parfait honneur
Dans leurs chants, s’ils partent du cœur.
Il veut qu’au plus lugubre office
On lui fasse ce sacrifice.

13- Les saints chrétiens des premiers temps
S’animaient au bien par leurs chants :
En chantant de divins cantiques
Ils devenaient tout séraphiques.

14- Le Saint-Esprit les y portait.
Souvent saint Paul leur répétait :
« Soyez joyeux, chantez, fidèles,
Quelques chansons spirituelles. »

15- Plusieurs fois les saints ont chanté,
C’est un secret de sainteté.
Marie a fait un beau cantique :
Chantons en prenant sa pratique.

16- Chantons donc, mais avec ferveur ;
Chantons, nous plairons au Seigneur ;
Chantons, nous lui donnerons gloire ;
Chantons, nous chanterons victoire !

17- Sachez qu’un cantique sacré
Rend notre esprit plus éclairé,
Chasse du cœur toute humeur noire
Et met Dieu dans notre mémoire.

18- Lorsque le cœur est abattu,
Le cantique porte vertu :
Chantez, malgré votre tristesse,
Et vous recevrez l’allégresse.

19- Le chant, ainsi qu’il est écrit,
Ouvre le cœur au Saint-Esprit :
Dieu descend dans un cœur qui chante
Et lui donne grâce abondante.

20- Le cantique charme nos maux
Et nous délasse en nos travaux :
C’est en chantant qu’on se dispose
À travailler à d’autre chose.

21- Le chant est un secret divin
Pour chasser tout esprit malin :
Un saint cantique que l’on chante
Le fait s’enfuir lorsqu’il nous tente.

22- Le monde a mêlé le péché
Dans des airs qu’il a recherchés :
Sa musique est l’apprentissage
De son plus fin libertinage.

23- Chantons et réparons l’honneur
Que ses chansons font au Seigneur :
Par de nouveaux airs de justice
Détruisons ceux de sa malice !

24- Chante, ivrogne, en buvant ton vin ;
Après avoir bu ce venin,
Va pleurer, va prendre avec rage
Le fiel des dragons pour breuvage !

25- Libertin, qu’il t’en coûtera
Pour ce vilain chant d’opéra !
Satan l’a fait par sa malice ;
En chantant tu lui rends service.

26- Avale, avale les poisons
De tes amoureuses chansons :
Un jour ces impures délices
Seront tes plus cruels supplices.

27- Le diable, par ce mot couvert,
Te fait rire, mais il te perd :
Il souffle ton chant, il t’enflamme
D’un tendre plaisir, mais infâme.

28- Tu prends un poison infernal
Et dis que ce n’est pas un mal :
Cette parole à double entente
Cache et fait ta perte évidente.

29- Tu nous appelles scrupuleux
Et nous t’appelons malheureux,
Car à ta chanson si plaisante
Tout le ciel pleure et l’enfer chante.

30- Loin de moi, chantres de Bacchus !
Loin de moi, chantres de Vénus !
Loin de moi, fins suppôts du diable !
Dont le malheur est déplorable.

31- Tu chantes cet air empesté
Devant tous pour être écouté,
Tu leur en apprends la cadence
Et tu corromps leur innocence.

32- Damne-toi si tu veux, mondain,
Mais ne damne pas ton prochain :
Il t’écoute, il apprend le crime,
Il le fait, il tombe en l’abîme.

33- Va, cloaque de saleté !
Vomir ailleurs l’impureté
Des chansons de tes amourettes
De tes paroles de fleurettes.

34- Amis de mon Dieu, tenons bon
Contre le monde et le démon :
Leur air est beau, leur voix est tendre,
Mais gardons-nous de les entendre !

35- Chantons en l’honneur de Jésus
L’excellence de ses vertus,
Pour les mettre en notre mémoire
Et les pratiquer avec gloire.

36- Faisons retentir l’univers
De nos chansons et de nos vers,
Afin que Dieu s’y glorifie
Et le prochain s’en édifie.



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AUX POÈTES DU TEMPS

(cantique de St Louis-Marie Grignion de Montfort)


1- Ceci n’est pas pour vous charmer,
Vous qui ne pensez qu’à rimer,
Grands poètes, gens incommodes.
Je laisse à d’autres vos méthodes.

2- Je sais bien que vous n’approuvez
Que les vers qui sont relevés,
Que des phrases à double étage,
Qui font un fou plutôt qu’un sage.

3- Vous ferez dix tours et contours
Pour faire un vers tout à rebours,
Pour exprimer une sornette,
Un vain combat d’une amourette.

4- Je pourrais, pour mille raisons,
Vous mettre aux petites maisons.
Que dis-je ? elles sont toutes vôtres :
Les rimeurs y placent les autres.

5- Vos vers sont polis avec art
Et souvent ce n’est que du fard,
Votre esprit est à la torture,
Vos vers le sont aussi, j’en jure.

6- Vos grands vers ne sont pas communs,
Oui, mais ils sont bien importuns,
Vous courez l’un et l’autre pôle
Pour dire une pauvre parole.

7- Si vos vers étaient vraiment grands,
Ils seraient compris des enfants ;
Ils sont si hauts, ils sont si rares,
Qu’ils en sont devenus barbares.

8- Grands poètes, je vous entends :
Vous rejetez les pauvres gens,
Vos vers sont pour les grands génies,
Aussi pleins que vous de manies.

9- À moins que les esprits du temps
N’y trouvent leurs contentements,
Fussent-ils des vers très sublimes,
Vous, vous en faites de grands crimes.

10- À la mode, un prédicateur,
À la mode, un subtil rimeur ;
À moins qu’on ne soit à la mode,
On est sot ou bien incommode.

11- Votre sublime et relevé
Montre votre goût dépravé.
Pour tout paiement, pauvres malades,
Vous voulez des louanges fades.

12- Vous cherchez par mille détours
Que quelque homme fou de nos jours
Vous dise, mais sans qu’il le pense :
Oh ! les beaux vers, la bonne stance !

13- Pauvres gens, je me ris de vous,
Puisque vous rimez presque tous
Pour qu’on applaudisse à vos veines.
C’est acheter trop cher vos peines.

14- Oui, vos vers sont trop achetés,
N’étant pleins que de vanités,
Que de cent sortes d’amourettes,
Indignes des âmes parfaites.

15- Car, sous la rime et la raison,
Vous cachez un mortel poison,
Un piège cruel mais si tendre,
Qu’à peine peut-on s’en défendre.

16- Vos vers sont bons, sans contredit ;
Rien n’est si beau, ni si bien dit,
Rime riche, bonne cadence,
Oui, mais quelle infâme impudence !

17- Si la rime était riche en Dieu,
Je ne l’estimerais pas peu,
Mais pauvre en vertu, riche en crime,
J’en hais le sens le plus sublime.

18- Vous débitez la vanité
Comme une pure vérité :
Vous ferez passer une fable
Pour une histoire véritable.

19- On dit que tout vous est permis,
Tant on vous croit les ennemis
Des vérités les plus certaines,
Amis des vanités mondaines.

20- Comme les poètes païens
Vous prenez les maux pour des biens,
Je pourrais vous nommer profanes,
Ou, pour bien rimer, de francs ânes.

21- Ô très méchants imitateurs,
Vous croyez vos vers sans grandeurs
S’ils n’ont emprunté quelque grâce
De ceux de Virgile et d’Horace.

22- Vos vers prêchent-ils les vertus ?
Y voit-on le nom de Jésus ?
Point du tout, mais la flatterie,
L’impureté, l’idolâtrie.

23- Parlez-vous des prédestinés ?
Vous ne louez que des damnés,
Que des hommes tout sanguinaires,
Que des amoureux téméraires.

24- Méchants poètes des faux dieux,
Vous me traitez de scrupuleux,
Ou vous croyez que, par bêtise,
Maintenant je vous scandalise.

25- Allez, je n’ose vous nommer,
Non de peur de vous diffamer,
Mais de peur de souiller ces pages
De si funestes personnages.

26- Oui funestes, je ne mens pas,
Car peut-être êtes-vous là-bas ;
Quoiqu’il en soit, vos livres restent,
Ces subtils poisons nous empestent.

27- À peine trouve-t-on en eux
Rien qui ne soit pernicieux,
L’impureté la plus plaisante
Est chez eux la plus innocente.

28- Vos vers sont beaux, ils font grand bruit :
Ce sont des vers luisants de nuit !
Le sage en méprise la pompe,
Tandis que l’homme fou s’y trompe.

29- Vos vers si finement conçus
Encensent Bacchus et Vénus,
Et partout ils battent la caisse
Pour enivrer de leur ivresse.

30- L’enfer est plein de gens perdus
Par vos livres si bien vendus !
On laisse là la sainte Bible :
C’est à vos vers qu’on est sensible.

31- Oh ! qu’ils en damnent tous les jours !
On ne peut arrêter leur cours,
Presque tout le monde les loue,
Sur les théâtres l’on les joue.

32- Oui, ce livre sage et mondain,
Que vous avez peut être en main,
A peut-être damné plus d’âmes
Qu’il ne contient de mots infâmes.

33- Vous me direz : « Je n’y vois rien
Qui ne soit bon, que ne soit bien. »
Ne vous y trompez pas, mon frère :
Leur poison tôt ou tard opère.

34- Leur brillant cache le poison,
Leur appas couvre l’hameçon ;
Parmi cent mots d’esprit, un tendre
Qui fait penser, tomber, se rendre.

35- Ne faites pas le Saint-Esprit
Auteur d’un si mauvais écrit :
Il est fait par l’esprit immonde
Pour séduire les gens du monde.

36- Si vous le gardez, le démon
Vous criera toujours qu’il est bon,
Qu’on ne pèche point à le lire,
Que Dieu ne défend pas de rire.

37- Jetez tous ces romans au feu !
Faites-le pour l’amour de Dieu,
Sans regarder la couverture,
L’impression ni la dorure.

38- Au feu ces contes insolents !
Au feu ces bons mots si galants !
Au feu ces tendres tragédies
Et ces infâmes comédies !

39- Voici mes vers et mes chansons :
S’ils ne sont pas beaux, ils sont bons,
S’ils ne flattent pas les oreilles,
Ils riment de grandes merveilles.

40- S’ils ne sont que pour les petits,
Ils n’en sont pas d’un moindre prix ;
Si ce sont des vers ordinaires,
Ils n’en sont pas moins salutaires.

41- Lisez-les donc, et les chantez,
Pesez-les et les méditez,
N’y cherchez point l’esprit sublime,
Mais la vérité que j’exprime.

42- Prédicateur, dans mes chansons,
Vous pouvez trouvez vos sermons :
J’en ai digéré la matière
Pour vous aider et pour vous plaire.

43- Voici des sujets d’oraison,
Je crois le dire avec raison,
Car souvent un vers, une rime
Font qu’une vérité s’imprime.

44- Chaque mot d’un vers doit porter
Pour qu’on le puisse méditer,
Pour le garder en sa mémoire,
Pour son bouquet et pour sa gloire.

45- Cœur affligé, chantez, chantez !
En chantant vous vous surmontez :
Le cantique est très efficace
Pour avoir la joie et la grâce.

46- Chantez, et de bouche et de cœur,
À haute voix, avec ardeur,
Pour bannir du cœur la tristesse
Et pour le remplir d’allégresse.

47- Prenez garde à la vanité,
Qui chante veut être écouté :
Si votre voix est ravissante,
Que votre âme soit innocente.

48- Chantons donc tous, et comme il faut,
Chantons les grandeurs du Très-Haut :
En chantant détruisons le vice
Et faisons aimer la justice !


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  TRIPTYQUE CONTRE LE MONDE

(3 cantiques de St Louis-Marie Grignion de Montfort)




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LES MALHEURS DU MONDE

 


INTRODUCTION :

1- Grand Dieu, donnez-nous du secours,
Armez-vous de votre tonnerre !
Le monde nous fait tous les jours
Partout une cruelle guerre :
C’est l’ennemi le plus malin
Parce qu’il est le plus humain.

2- Amis de Dieu, braves soldats,
Unissons-nous, prenons les armes,
Ne nous laissons pas mettre à bas,
Combattons le monde et ses charmes :
Puisque Dieu même est avec nous,
Nous le vaincrons, combattons tous !

3- Armons-nous de la vérité
Contre les amis du mensonge,
Faisons-leur voir par charité
Que tous leurs biens ne sont qu’un songe :
Armons-nous d’une vive foi,
Nous leur ferons à tous la loi.

4- Mais pour être vraiment vainqueurs,
Et pour avoir tout l’avantage,
Vidons nos esprits et nos cœurs
Des faux préjugés du bas âge :
Vomissons ce cruel venin,
Ou bien nous combattrons en vain.

 

PREMIER MALHEUR :
(Il est malheureux en lui-même)

5- Qu’est-ce que ce monde trompeur ?
C’est l’assemblée universelle
Des pécheurs qui font au Sauveur
Une guerre horrible et cruelle,
Quelquefois tout ouvertement,
Mais plus souvent secrètement.

6- Il est nommé du Saint-Esprit :
La chaire de la pestilence,
Le chemin large où l’on périt
Sans qu’on le croie ou qu’on y pense,
La synagogue de Satan
Et le règne de ce tyran !

7- La grande église des malins,
L’infâme et grande Babylone,
Où les démons en souverains
Sont finement sur le trône,
Où tous les biens sont empêchés,
Où l’on enseigne tous péchés.

8- Le monde est Satan travesti
Afin de se rendre agréable :
C’est son armée et son parti
Pour être un prince formidable,
Pour enrôler tout l’univers
À le suivre dans les enfers.

9- Ô Dieu, qu’il enrôle de gens
Dans ce parti tout diabolique !
Mille petits, dix mille grands,
Le paysan, le politique,
Des demi-dévots, des savants,
Des libertins, de bons vivants.

10- Leur père-maître est le démon,
Qui les anime et les entraîne :
Ils n’offensent Dieu qu’en son nom,
Et quoiqu’ils croient l’avoir en haine,
Il en est le prince et le roi,
En cachette il leur fait la loi.

 

DEUXIÈME MALHEUR :
(Il est l’ennemi de Dieu et de son Fils Jésus-Christ)

11- Le monde attaqua Jésus-Christ
Tout le temps qu’il vécut sur terre ;
Il est tous les jours Antéchrist,
Tous les jours il lui fait la guerre :
Tous les jours il le contredit
Dans ce qu’il fait et ce qu’il dit.

12- Il détruit ou bien contrefait
Ses sentiments et ses maximes :
Ce que Dieu fait, il le défait
Afin d’autoriser ses crimes !
Il contrefait ses sacrements
Et ses divins commandements.

13- Tous les serviteurs du Seigneur
Sont combattus par sa malice :
Il leur fait tort, il leur fait peur,
Il les flatte, il leur rend service ;
Il leur compte mille raisons
Afin qu’ils boivent ses poisons.

14- Il fait de leur dévotion
Le sujet de sa raillerie :
Il l’appelle une illusion
Ou bien une bigoterie ;
Il condamne leurs actions,
Il prend mal leurs intentions.



TROISIÈME MALHEUR :
(Il est tout pénétré de malice et l’ennemi de la vertu)


 15- Pour détruire leur sainteté
Il se sert de mille malices ;
Pour les tourner de son côté,
Il invente mille injustices.
Mon Dieu, qu’il en a supplanté
Par ses pièges d’iniquité !

16- Il couvre, mais très finement,
Le péché de la vertu même :
Pour le faire entrer doucement
Il flatte, il proteste qu’il aime.
Par ses sourires, ce trompeur
Enfonce un poignard dans le cœur !

17- Le monde est le grand boute-feux
Et le grand instrument des diables
Pour autoriser en tous lieux
Les crimes les plus détestables :
Les mondains nomment scrupuleux
Tous ceux qui ne font pas comme eux.

18- Il sème l’orgueil chez les grands,
La mollesse et la suffisance ;
L’ignorance chez les paysans,
L’ivrognerie et médisance ;
L’envie et les divisions
Jusque dans la religion !

19- L’injustice dans les palais,
Dans les lieux publics, les scandales ;
Dans les lits et les lieux secrets,
Les impuretés les plus sales ;
Dans l’église et dans les lieux saints,
L’insolence des libertins !

20- La mollesse et l’oisiveté
Et le luxe parmi les dames,
Le babil et la vanité
Parmi presque toutes les femmes,
L’avarice chez les marchands
Et l’orgueil parmi les savants.

21- Dans les soldats, les jurements,
Les blasphèmes, les violences ;
Partout mille dérèglements,
Les jeux, les bals, les insolences :
De ces péchés tout est rempli,
Le sage même en est sali !

22- Que dis-je, hélas ! je dis trop peu,
Homme et garçon et fille et femme
Sont brûlés presque tous du feu
De sa concupiscence infâme !
Il met partout la vanité,
Presque partout l’impureté.

23- Le monde étant sur son déclin,
Il n’est que crime et qu’injustice :
Il n’a jamais été si fin,
Ni si pénétré de malice ;
Qui sait pécher plus en secret :
Il passe pour le plus discret.

 

QUATRIÈME MALHEUR :
(Le monde est aveugle)

24- Le monde est dans l’aveuglement
Et le malheureux se croit sage,
Il est dans l’endurcissement :
Quiconque le reprend, l’outrage...
Hélas ! il ne voit ni n’entend,
C’est ce qui rend son mal très grand.

25- Ne prend-il pas le mal pour bien,
L’utile pour le dommageable,
Pour un bonheur, ce qui n’est rien,
Et pour faux, un bien véritable,
Tant ses erreurs l’ont aveuglé,
Tant ses péchés l’ont déréglé.

26- Il ne sait point la vanité
Des biens que la terre présente,
Il ignore la cruauté
De l’esprit malin qui le tente :
Comme il ne voit que par ses sens,
Il juge mal des biens présents.

27- Il craint un fantôme trompeur ;
Si Dieu menace, il est sans crainte !
Il est sans loi, sans foi, sans peur
Devant cette Majesté sainte :
Il ne craint point ses jugements
Ni ses terribles châtiments.

28- Ses jugements sont renversés :
Il croit que les fous sont des sages ;
Que les sages sont insensés,
Des bigots, de sots personnages,
Et comme il croit très clairement,
Il décide tout hardiment.

29- Cet aveugle est fier et hardi !
Il ne veut pas qu’on le reprenne
Quoiqu’il soit un grand étourdi :
À le reprendre, on perd sa peine.
Il est, ainsi qu’il est écrit,
Incapable du Saint-Esprit.

30- Chose étonnante, il ne peut pas
Recevoir aucune lumière :
Il restera jusqu’au trépas,
Ainsi que le diable son père,
Impie, orgueilleux, scandaleux,
Aveugle, endurci, malheureux !

 

CINQUIÈME MALHEUR :
(Il est un scandaleux)

31- Oui malheur au monde ! a dit Dieu,
Parce qu’il cause du scandale :
Il vomit sans cesse en tout lieu
Contre tous sa rage infernale,
Tout homme en est scandalisé,
Le sage comme l’insensé.

32- Dans les métiers et les emplois,
Qu’on voit d’appâts épouvantables
Dont le monde s’est fait des lois
Pour damner plusieurs misérables !
Mais ses scandales sont si fins
Qu’il trompe même les plus saints.

33- Sous l’appât il met l’hameçon
Qui perd l’âme sans qu’elle y pense,
Il mêle en son vin le poison
Qui forme la concupiscence ;
Sous un seul mot dit en riant,
Il cache un poison très criant.

34- Il couvrira l’impureté
D’une fine plaisanterie,
Le luxe de la vanité,
De propreté, de modestie ;
L’avarice et l’orgueil du cœur
D’un bon ménage et point d’honneur...

35- Il fait tirer l’arc aux pécheurs
Contre les âmes innocentes ;
Pour percer leurs yeux et leurs cœurs
En mille façons différentes :
Il forme des pièges malins
De leurs yeux, leur bouche et leurs mains.

36- Il a tant d’adresse à tromper,
L’amorce est si belle et si tendre,
Qu’à peine peut-on l’échapper,
Qu’à peine peut-on s’en défendre :
Heureux celui qui s’est enfui
Dans un désert bien loin d’ici.

 

SIXIÈME MALHEUR :
(Ses richesses sont vaines et trompeuses)

37- Il promet à ses sectateurs
Honneurs, plaisirs, biens périssables
Qui sont au fond des biens trompeurs,
Qui ne font que des misérables.
Ô vanité des vanités !
La plus grande des vérités.

38- Qu’est-ce que tout l’or et l’argent
Et les richesses qu’on appelle ?
Un morceau de terre changeant
Dont la surface paraît belle,
Un morceau de terre doré,
Un métal un peu plus lustré.

39- L’argent est un bien passager,
Il veut toujours changer de maître ;
Quand on l’empêche de changer
Il devient le plus cruel traître,
Quand il est longtemps conservé
Il est un poison réservé.

40- Quelques dépouilles d’animaux,
Des morceaux de boue et de plâtre,
Quelques bois coupés en morceaux,
Une terre blanche et jaunâtre,
Voilà les plus grands biens des fous
Et qui les damnent presque tous.

41- On les perd par mille accidents,
Un voleur les pille ou les mange,
Une rouille se met dedans ;
Que leur changement est étrange !
Il ne durent qu’un seul moment
Pour les perdre éternellement.

42- Voyez-vous ce riche Crésus
Que son argent rend honorable ?
Il perdra bientôt ses écus,
Il mourra comme un misérable.
Qu’emportera-t-il de son bien ?
Hélas ! un linceul ; hélas ! Rien.

43- Tous ces biens ont je ne sais quoi
De pernicieux et funeste ;
Ils cachent un poison chez soi,
Qui nous souille et qui nous empeste,
C’est ce que la foi nous apprend,
C’est ce que le sage comprend.

44- Ces biens passés de main en main
Ont damné l’impie et l’avare,
Ont contracté tant de venin
Qu’à peine un sage s’en sépare.
Ce qui fait que la vérité
Les nomme : dieu d’iniquité.

45- Dès lors qu’on veut les acquérir,
Dès lors on pèche, on est coupable,
Puisque, quand on veut s’enrichir,
On est pris au piège du diable.
Si c’est un mal de les vouloir,
Que sera-ce de les avoir ?

46- Ces biens sont la poix et la glu
Pour lier et perdre les âmes,
Leur pouvoir est comme absolu
Pour les précipiter aux flammes,
À peine peut-on les toucher
Sans s’y coller, sans y pécher.

47- La plus grande difficulté,
Et la plus grande que je sache,
Est d’acquérir la sainteté
En les possédant sans attache :
C’est un effort miraculeux,
C’est un prodige merveilleux !

48- A-t-on du bien en quantité ?
Vit-on dans l’aise et l’abondance ?
Adieu la foi, la charité,
La pénitence et l’espérance.
C’est ce qu’on voit communément,
Mais je ne comprends pas comment.

49- On voit mille gens aujourd’hui
Qui font du bien mauvais usage,
Et qui gardent le bien d’autrui
Sans réparer aucun dommage.
Que de voleurs fins et rusés
Que le monde a canonisés !

50- Je ne dis mot aux usuriers
Qui sont si communs dans le monde,
Aux partisans, aux gros fermiers
Qui volent sur la terre et l’onde ;
Ils ont trop de biens mal acquis
Pour profiter de mes avis.

51- Mais quoiqu’on les ait justement,
Ce sont des épines piquantes,
Qui piquent, mais secrètement,
Les âmes les plus innocentes.
Que de travaux à les trouver,
Que de soins à les conserver !

52- L’argent est la divinité
Auquel le monde sacrifie
Son temps, son repos, sa santé,
Et tous les biens de l’autre vie,
Sans se soucier du prochain,
Ni même de son souverain.

53- Parlez-lui de gagner du bien,
Il vole, il s’expose, il s’engage ;
Mais de Dieu, ne lui dites rien,
Car il n’entend pas ce langage ;
Son cœur a passé dans son or,
C’est son seul dieu, c’est son trésor.

54- Plus un homme a de revenus,
Et plus les démons l’ensorcellent ;
Pus il a de soins superflus
Qui le piquent, qui le bourrellent ;
Son bien est son cruel tyran
Et plus cruel que n’est Satan.

55- Quand on les perd, quelles douleurs !
L’âme d’un riche en est navrée,
Mais quand il meurt, quelles fureurs !
Sa pauvre âme en est déchirée ;
Quel désespoir et quel effort
D’un malheureux riche à la mort !

56- Oh ! quels terribles jugements
Dieu fait de leur mauvais usage !
Mais dans l’enfer quels châtiments,
Quel désespoir et quelle rage !
Après cela comme les fous,
Avec ces faux biens, damnez-vous.

 

SEPTIÈME MALHEUR :
(Il est malheureux en ses plaisirs)

57- Voilà quelle est la vanité
Des biens que le monde présente,
Qu’il cherche avec avidité
Sans qu’aucun jamais le contente,
Mais ses plaisirs sont aussi faux
Et lui causent autant de maux.

58- Les plus grands plaisirs sont trompeurs,
Ce sont des plaisirs en image
Qui ne contentent point les cœurs ;
Qui les affament davantage,
Qui font ressentir à la fin
Le remords, l’ennui, le chagrin.

59- Il n’a que des plaisirs charnels,
Ce sont des charognes puantes
Qui font des hommes criminels,
Qui rendent les âmes méchantes,
Qui flattent les sens au dehors
Et qui souillent l’âme et le corps.

60- Le pécheur mondain danse et rit
Sur le bord de son précipice,
Devant un Dieu qui le maudit
Et qui s’arme dans sa justice ;
Il foule aux pieds Jésus en croix,
Il méprise ses saintes lois.

61- Il invente pour son malheur
Mille plaisirs et mille modes,
Tabac et poudre de senteur,
Mille raffinements commodes ;
Il ne pense qu’à se garder
De ce qui peut l’incommoder.

62- Il ne s’occupe qu’à penser
À son corps pour le satisfaire ;
Boire et manger, rire et danser
Semble être son unique affaire ;
Tandis qu’il engraisse sa chair,
Il plonge son âme en enfer.

 

HUITIÈME MALHEUR :
(Il est malheureux dans son orgueil et ses honneurs)

63- Le monde est toujours orgueilleux,
Dans le temps même qu’il s’abaisse ;
Il veut faire éclater aux yeux
Sa modestie et son adresse,
Il est ravi qu’on puisse voir
Ses talents, ses biens, son pouvoir.

64- Il couvre et cache ses défauts
Pour faire montre de sa gloire ;
Il abaisse tous ses égaux
Pour s’en faire partout accroire ;
Il ne veut hanter que les grands,
Il méprise les pauvres gens.

65- On connaît l’orgueil d’un mondain,
Sa gloire vaine et chimérique,
À son air, ses habits, son train,
Lorsqu’il marche, lorsqu’il s’explique,
Il ne respire que grandeur,
Qu’orgueil, que faste et que hauteur.

66- Ce n’est qu’à son corps défendant
Qu’il obéit et qu’il s’abaisse.
À commander il est ardent,
Il croit en avoir la sagesse,
Il affecte la primauté
En tout, jusqu’en l’humilité.

67- Mais, qu’est-ce que tout cet honneur ?
C’est un sommeil, une chimère,
Une fumée, une vapeur,
Un vent, une écume légère,
Un éclat brillant et pompeux
Qui trompe les cœurs et les yeux.

68- C’est le plus fin des hameçons
Que le démon lui puisse tendre,
C’est le plus subtil des poisons
Qu’il donne presque à tous pour prendre.
Satan tombé par son orgueil
Jette le monde au même écueil.

69- Dieu cache au monde ses secrets,
Il lui résiste en sa Sagesse,
Il lui prépare pour jamais
La flamme la plus vengeresse :
Autant qu’il s’est glorifié,
Autant il sera châtié !

 

NEUVIÈME MALHEUR :
(Il est oisif)

70- Que ce maudit monde est trompé !
Il perd tout le temps de la vie,
Ou bien, il est tout occupé
À faire quelques niaiseries ;
S’il n’est pas dans l’oisiveté,
Il s’occupe à l’iniquité.

71- Il est toujours dans les dehors
Sans tourner vers Dieu sa pensée,
Il est tout occupé du corps
Et sa pauvre âme est délaissée,
Il méprise le vrai bonheur
Et s’occupe d’un bien trompeur.

72- Oh ! grand aveugle, oh ! l’imposteur :
Au ciel il préfère la terre,
La créature au Créateur,
À la paix de son Dieu, la guerre,
Le mensonge à la vérité,
Et le temps à l’éternité.

73- On l’entend parler nuit et jour
De la gazette et des nouvelles,
Et de l’armée et de la cour,
Et de mille autres bagatelles,
D’argent, de repas, d’ornements,
De jeu, d’habits, de passe-temps.

74- Il n’est qu’esprit, il n’est qu’ardeur
Pour les affaires temporelles,
Mais que bêtise et que tiédeur
Dans les affaires éternelles.
Quand il joue, il aime à veiller ;
Quand il prie, il faut l’éveiller.

75- Il passe sa vie et son temps
Non à l’unique nécessaire,
Mais à de vains amusements,
À mal faire ou bien à rien faire,
À regarder et babiller,
À visiter et s’habiller.

 

DIXIÈME MALHEUR :
(Il est endurci)

76- Il est tout endurci du cœur,
Il ne reconnaît pas son crime,
Il ne sent point sa puanteur
Ni le lourd fardeau qui l’opprime ;
Il ne croit pas qu’il ait en soi
Le démon pour père et pour roi.

77- Sans craindre enfer, ni jugement,
Ni Dieu, ni diable, ni vengeance,
Ce maudit pèche hardiment
En riant avec insolence ;
En péchant, il chante ses vers,
Il fait du crime ses concerts.

78- Il dit qu’il a l’esprit trop fort
Pour gémir, pour verser des larmes,
Pour craindre l’enfer ou la mort
Et pour en sentir les alarmes ;
Le bon Dieu, dit-il, est si bon,
À la mort, j’aurai le pardon.

79- Tout insensible aux vérités
Qui font trembler les bonnes âmes,
De vanités en vanités,
De péchés en péchés infâmes,
Il meurt sans appréhension,
Il tombe en la damnation.

80- Il est dur envers le prochain
Lorsqu’il le voit dans la misère,
Il parle au pauvre avec dédain,
S’il lui donne, c’est par colère ;
Il aura du pain pour son chien,
Mais, pour son frère, il n’aura rien.

81- Il est tout plein de dureté
Pour les âmes du purgatoire :
À leurs dépens avec gaieté
On le voit manger, rire et boire.
Il paiera d’un De profundis
Ses pauvres parents étourdis.

82- Il trouve en leurs legs de l’excès,
Il les diminue ou diffère,
Ou par soi-même ou par procès,
Il plaide son père ou sa mère.
Ô pauvres parents trépassés,
Vos enfants vous ont délaissés !

83- Il fait son plaisir du péché ;
Qu’on offense Dieu, qu’on l’outrage,
Son cœur n’en est pas plus touché,
S’il n’en souffre quelque dommage ;
Il a son intérêt à cœur,
Mais non pas celui du Seigneur.

84- Quoique le monde soit maudit
Et condamné du Sauveur même,
On le voit qui se divertit
Au milieu de son anathème,
Tant il a l’esprit aveuglé,
Tant il a le cœur déréglé.



 
ONZIÈME MALHEUR :
(Il est malheureux dans ce monde et dans l’autre)

85- C’est le démon secrètement
Qui le démène et qui l’entraîne,
Qui le lie invisiblement,
Qui le tient captif à la chaîne
Pour opérer l’iniquité
Selon sa seule volonté.

86- Il crie à tous : la paix, la paix,
Mais il n’en a pas pour un double,
Il a mille remords secrets.
Sa plus grande joie est un trouble,
Il est une orageuse mer
Qui ne se peut jamais calmer.

87- Quoiqu’il fasse pour étouffer
Le remords de sa syndérèse,
Il ne peut pas en triompher,
Il ne peut pas vivre à son aise ;
Quoiqu’au dehors il soit joyeux,
Au dedans, il est malheureux.

88- Quoi que fasse cet imposteur
Pour jouir d’une paix parfaite,
Ses péchés passés lui font peur,
Le temps à venir l’inquiète,
Sans qu’il puisse être un seul instant
Vraiment heureux, vraiment content.

89- Dans la vie il ne peut avoir
Que quelque plaisir en figure,
Mais à sa mort quel désespoir,
Quelle rage, quelle écorchure,
Oh ! quels troubles, et quels tourments,
Après la mort, quels châtiments !

 

DOUZIÈME MALHEUR : 
(Il est malheureux dans l’éternité)

90- On lui donne pour ses plaisirs,
Pour ses honneurs et ses richesses,
Mille maux, mille déplaisirs
Et mille peines vengeresses ;
Pour un moment de vanité,
Malheur à toute éternité !

91- Voilà le monde et ses malheurs.
Peut-on aimer ce misérable ?
Peut-on suivre ses sectateurs
Dans leur malheur si déplorable ?
Crions donc tous : malheur ! malheur !
Malheur à ce monde trompeur !

92- Voilà plusieurs pièges malins
Dont il prend en secret les âmes,
Pour les attirer à ses fins
Et les précipiter aux flammes ;
Pour nous garantir de ses traits,
Méprisons ses malins attraits !








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